Lutter contre la pénurie de main-d’œuvre qualifiée de manière enrichissante
Personnel/direction
La pénurie de main-d’œuvre qualifiée touche toutes les branches, y compris celle de la construction métallique. Une entreprise de construction métallique de Suisse centrale a choisi une voie plutôt particulière en employant du personnel ayant le statut de réfugié. Cet article vous donne de plus amples informations sur le contexte et les expériences engrangées.
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Personnel/direction
Lutter contre la pénurie de main-d’œuvre qualifiée de manière enrichissante
La pénurie de main-d’œuvre qualifiée touche toutes les branches, y compris celle de la construction métallique. Une entreprise de construction métallique de Suisse centrale a choisi une voie plutôt particulière en employant du personnel ayant le statut de réfugié. Cet article vous donne de plus amples informations sur le contexte et les expériences engrangées.
De nombreux entrepreneurs de la branche de la construction métallique connaissent le phénomène de la « pénurie de main-d’œuvre qualifiée », que ce soit parce que les candidats potentiels n’ont pas les compétences requises ou parce qu’ils ne postulent pas, ou à des conditions irréalistes.
Ces derniers temps, différentes entreprises ont développé différents concepts pour pallier cette pénurie de main-d’œuvre qualifiée. L’accent est ici mis sur la promotion active et le développement de son propre personnel. Elle influence positivement la performance qualitative de l’entreprise, mais n’augmente pas forcément la production quantitative en raison de la stagnation des effectifs.
Détendu grâce à de nouvelles voies
Peter Wirz, propriétaire et directeur d’Odermatt Metallbau AG, dont le siège est à Kriens, aborde l’avenir de manière relativement sereine à ce sujet. Les carnets de commandes de la PME de dix collaborateurs sont bien remplis et elle peut compter sur un personnel actif et compétent pour la mise en œuvre. L’entreprise planifie, produit et réalise des travaux de construction métallique généraux tels que portes, fenêtres, vitrages, constructions en acier et balcons, etc. Elle travaille avec les matériaux les plus divers tels que l’acier, l’acier inoxydable, l’aluminium et aussi des métaux non ferreux. Elle gère en outre une représentation de fenêtres et de portes en aluminium de System Schweizer.
Peter Wirz a senti la pénurie de main-d’œuvre qualifiée qui s’annonçait il y a des années et s’y est adapté en conséquence. « Il serait présomptueux de dire que j’aurais tout vu venir et que j’aurais déjà posé les jalons en conséquence il y a longtemps », déclare l’entrepreneur. Avant d’ajouter : « Mais j’avais déjà une idée de base sur ce thème il y a des années : il s’agissait de « l’ouverture à la nouveauté ». J’ai pris conscience qu’à un moment donné, les solutions éprouvées ont été abandonnées et qu’il fallait trouver de nouvelles voies. »
L’entrepreneur a ainsi élargi son spectre de réflexion et d’action. La société coopérative FuturX a très rapidement frappé à sa porte et s’est renseignée sur les possibilités d’engagement d’un jeune réfugié afghan en 2015. Peter Wirz décide alors d’embaucher dans son entreprise un homme qu’il ne connaissait pas avec un statut de réfugié F.
Priorité à la formation
Jan, c’est ainsi que se nomme ce nouveau collaborateur, a aujourd’hui 30 ans et a commencé un stage d’un an dans un métier de la construction métallique en août 2019. Il a ensuite suivi une formation avec attestation d’aide-constructeur métallique AFP, qu’il a achevée avec succès fin juillet 2022. Depuis, Jan travaille sans interruption dans l’entreprise et n’a cessé de progresser. Il est aujourd’hui considéré comme un collaborateur précieux de la société. Jan vit en collocation avec deux autres habitants du pays, ce qui a certainement un effet positif sur son bien-être social, mais ne favorise pas vraiment ses connaissances de la langue allemande. Son allemand est suffisant pour une communication quotidienne au travail, mais il peut encore progresser. Jan apprend actuellement à conduire. Il souhaite bientôt passer son permis pour franchir une nouvelle étape vers son indépendance. L’entreprise, et en particulier Rachel Wirz, le soutient dans ce projet. Rachel Wirz travaille également au sein de la société et gère les domaines administratifs. Dans ce cas, elle met son véhicule à disposition. Elle assume le rôle d’instructrice à la place du passager et Jan a ainsi la possibilité d’effectuer quelques heures d’apprentissage qui ne pèsent pas sur son budget.
Après Jan, c’est au tour d’Ali
Début 2024, Peter Wirz a décidé d’embaucher un autre réfugié afghan. Aujourd’hui âgé de 25 ans, Ali a fui l’Afghanistan en 2016 et travaille depuis février 2024 comme « personne formée dans le domaine de la construction métallique » chez Odermatt Metallbau AG. Ali est également considéré comme un collaborateur fiable et polyvalent qui parle relativement bien l’allemand. Lui aussi aimerait passer son permis de conduire dans un avenir proche.
Bara, une spécialiste du soudage
En février 2024, Peter Wirz engage une autre professionnelle étrangère dans son entreprise : Bara, qui vient de République tchèque. Elle réalise des travaux généraux de construction métallique et maîtrise de nombreuses techniques de soudage. Elle exploite toutes les possibilités des postes de soudage à sa disposition et crée un cordon de soudure parfait. Bara a travaillé pendant 5 ans dans une entreprise de construction métallique en Allemagne et a changé d’orientation en passant des examens de soudage.
Franz, originaire de Slovénie
À cela s’ajoute un autre collaborateur d’origine étrangère. Franz, 44 ans, travaille dans l’entreprise depuis début 2024. Il est également considéré comme un « personne formée dans le domaine de la construction métallique » avec une formation de ferronnier d’art et exécute les travaux de construction métallique les plus divers de manière largement autonome.
Tout ne va pas toujours bien
Peter Wirz ne cache pas que tout ne se passe pas toujours aussi facilement et sans accroc. Il faut beaucoup de temps pour les clarifications, les inscriptions, les demandes, l’aide à la recherche d’un logement et aussi de la patience en raison de la barrière de la langue. La diversité des mentalités est parfois un défi à ne pas sous-estimer, mais c’est aussi un enrichissement important pour l’entreprise.
Interview
Questions brûlantes à l’entrepreneur Peter Wirz.
Qu’est-ce qui vous a poussé à embaucher des personnes ayant le statut de réfugié ?
Comme je l’ai déjà mentionné, j’ai réalisé il y a des années que je devais emprunter de nouvelles voies pour équilibrer le personnel de mon entreprise. L’idée que l’embauche de main-d’œuvre étrangère pourrait être une solution pour moi est née d’une réflexion libre et ouverte visant à explorer ces nouvelles voies.
L’ancienne génération se souvient des différentes vagues d’immigration que nous avons vécues nous-mêmes en Suisse. Les immigrés italiens des années 1960-1970, par exemple, se sont très bien intégrés et leurs descendants n’ont rien à envier aux Suisses. Il en va de même pour l’immigration en provenance des Balkans. Et cela concerne à mon avis également l’évolution actuelle que nous, citoyens et entrepreneurs, ne pouvons pas arrêter.
Qu’entendez-vous par « réflexion libre et ouverte » ?
Les situations évoluent constamment au fil du temps. Ce qui avait fait ses preuves il y a 10 ou 15 ans doit peut-être être remis en question aujourd’hui. Cela vaut dans de nombreux domaines, que ce soit sur le plan privé, professionnel ou politique. Nous devons être ouverts à la nouveauté.
Une partie de votre personnel est constitué de réfugiés d’origine étrangère. Ces personnes ne peuvent pas présenter de diplôme. Comment garantissez-vous la qualité et la continuité dans votre entreprise ?
Ce qui n’a pas été abordé jusqu’à présent dans le cadre de ce thème spécifique, c’est que notre équipe compte bien entendu aussi des spécialistes et des cadres très expérimentés. Avec notre chef d’atelier, nous essayons d’engager autant que possible les collaborateurs en fonction de leurs capacités. Comme je suis les commandes de très près, de l’offre à la planification, en passant par la fabrication et le montage, ce système fonctionne arfaitement dans une entreprise de notre taille.
Comment cela se passe-t-il concrètement ?
En principe, nos collaborateurs sont tous très polyvalents. Cela nous permet également d’être flexibles. Il me semble important d’accorder une grande attention au développement du personnel au sein de l’entreprise et de le mettre en pratique. Si, par exemple, un collaborateur commet une erreur, celle-ci doit être analysée (également dans son intérêt) et son exécution correcte doit être démontrée. Il faut donner une chance de faire juste la deuxième fois.
Comment rémunérez-vous les collaborateurs ayant un permis B de réfugié ?
En principe, nous rémunérons nos collaborateurs en fonction de leur prestation. Il en va de même pour les réfugiés bénéficiant d’un permis B. Ils ont le même contrat de travail que les collaborateurs et collaboratrices suisses. Cela concerne également les assurances et les contributions sociales. Ils doivent payer eux-mêmes le loyer de leur appartement et tous les autres frais de subsistance.
La voie que vous empruntez en matière de politique du personnel comporte-t-elle aussi des risques pour vous et votre entreprise ?
Oui, c’est sûr. En tant qu’entrepreneur, j’investis dans la politique du personnel en embauchant des collaborateurs et collaboratrices de régions en crise et en investissant d’abord dans leur formation. Il s’agit d’investissements financiers dans le matériel scolaire, les cours, les préfinancements et les heures internes des supérieurs hiérarchiques. À cela s’ajoutent de nombreuses autres tâches administratives telles que l’aide à la recherche d’un logement, l’accompagnement lors des démarches administratives, etc.
À ce stade, je n’ai aucune garantie que le contrat de travail en question sera de longue durée. Si la personne perd son statut de réfugié(e) ou si elle quitte l’entreprise pour d’autres raisons, je n’aurai plus qu’à en payer les frais.
Avez-vous déjà rencontré des problèmes en raison de différences culturelles ?
Jusqu’à présent, il n’y a jamais eu de problèmes sérieux. Mais nous avons aussi dû apprendre que, lors d’un repas d’entreprise, par exemple, le menu devait proposer des alternatives aux plats typiquement suisses. Ou que les hommes de certaines cultures ont peut-être plus de mal au début à se laisser guider par une femme (ma femme est aussi entrepreneuse). Mais jusqu’à présent, nous avons toujours trouvé une solution.
Quel est votre bilan personnel ?
C’est un atout pour notre entreprise de pouvoir collaborer avec des citoyens d’autres pays. Je profite de cette occasion pour encourager d’autres entrepreneuses et entrepreneurs à sauter le pas. Les entreprises doivent lutter contre les préjugés et promouvoir une approche globale. Une confiance mutuelle est nécessaire de part et d’autre. De plus, « le travail contribue de manière essentielle à l’intégration ». ■